Les amants

Le mois de mai s’était lentement installé sur Paris, amenant avec lui le soleil et la chaleur. L’été serait bientôt là, la canicule aussi. Mais pour le moment, Octave pouvait profiter des escaliers du Sacré-Cœur sans cuire sous son blouson de cuir.
La mi-saison, c’était ce qu’il préférait.
Il pouvait sentir le vent le recoiffer, les rayons lumineux le réchauffer. Ses lunettes de soleil posées sur son nez lui permettaient de distinguer chaque détail, qu’il ne percevait plus lorsqu’il devait les retirer. Et, surtout, voir les premières jambes nues de l’année lui faisait toujours un bien fou.
Oh bien sûr, des jambes, il en voyait tout le temps. Ces derniers temps, il profitait notamment de celles de Héloïse Dorange, galbées à souhait, mais cela ne le détournait pas de l’attention qu’il portait aux autres. Comme cette fille, à la jupe droite et au chemisier blanc. Une adorable catholique, à sa façon d’admirer le Sacré-Cœur. Avec dévotion et amour.
Si Octave avait été un mauvais garçon, il aurait détourné son attention pour qu’elle le dévisage de la même manière. Il aimait tellement lorsque les petites filles sages se pâmaient devant lui.
Mais il avait une femme à respecter – malgré ses activités professionnelles – et elle n’allait pas tarder à arriver. Il ne comptait pas se faire prendre la main dans le sac. Ce n’était ni son genre, ni sa volonté. Il aimait préserver son égo.
— Toi, tu t’emmerderais pas. Tu coures après les chiennes qui te plaisent et basta.
Rex pencha la tête sur le côté face aux mots de son maître. Il avait toujours du mal à comprendre les humains mais le sien avait une manière particulière de s’exprimer. Il savait toujours comment lui parler pour créer une discussion.
Et aujourd’hui, Rex eut envie de lui dire de tout lâcher. De toute façon, il n’aimait pas la nouvelle blonde qui traînait trop autour de son papa. Elle était trop présente. Trop méchante. Trop brusque. Trop. Elle était partout.
Tout le temps.
La preuve, sa voix de crécelle s’éleva dans leur dos et Octave n’eut plus d’yeux que pour elle.
En se levant, il intima à Rex de rester bien en place sur sa marche et partit rejoindre la directrice du club de striptease. Il glissa une main dans le creux de sa hanche, la ramena à lui pour déposer un baiser sur sa joue droite et retira ses lunettes. Ses yeux faisaient toujours des ravages. Il n’allait pas s’en priver.
— Comment ça va ? Tes gardes du corps ne sont pas là ? C’est drôle, dès qu’on se voit, tu es seule. A croire que tu as pleinement confiance en moi. Ou pas suffisamment en eux pour leur confier tes vilains petits secrets.